Ils étaient là environ deux cent commandeurs, délégués de divers ateliers de la région.
L’assemblée était présidée par un nègre,Boukman, dont la parole enflammée exaltait les conjurés. Avant de se séparer et de sceller les engagements pris, on procéda à une cérémonie impressionnante. Il pleuvait avec rage. Tandis que l’orage grondait et que les éclairs sillonnaient le ciel, une négresse de haute stature apparut brusquement au milieu de l’assistance.
Elle était armée d’un long couteau pointue, qu’elle faisait tournoyer au dessus de sa tête, en exécutant une danse macabre et en chantant un air africain que les autres chantaient en chœur,prosternés, la face contre terre. On traîna ensuite devant elle un cochon noir, qu’elle éventra de son couteau. Le sang fut recueilli dans une gamelle de bois et servi à chaque délégué. »
Sur cette illustration d’André Normil on y voit une jeune prêtresse dansant et sur le point de sacrifier un cochon noir. L’homme debout brandissant un coutelas est Boukman. Les vévés dessinés sur le sol sont ceux d’Ogou Feray, loa du feu et de la guerre dont on reconnaît les symboles: le sabre la machette et le feu. On reconnaît aussi la croix de Legba, le loa qui ouvre la porte des autres loas. Après avoir offert en sacrifice l’animal aux forces du Vodou et avoir bu son sang l’assistance prêta le fameux serment: »Vivre libre ou mourir ».Cette cérémonie va galvaniser les esprits et se positionner comme le prémisse d’une révolte qui durera plusieurs années et qui par la suite sera menée en grande partie par Toussaint Louverture.
Quelques jours plus tard, le 21 août,les esclaves du Nord vont égorger un millier de colons et détruire sucreries et caféteries. Cette nuit marquera le début d’une guerre d’indépendance qui durera plusieurs années.
En 1794 sera aboli l’esclavage dans les colonies françaises, mais en 1802 Napoléon, mû par le désir de restituer un empire colonial en Amérique, décide d’envoyer des troupes reconquérir l’ile et y rétablir l’esclavage,Toussaint Louverture est fait prisonnier et enfermé au fort de Joux dans le Jura ou il mourra quelques mois plus tard. Mais les garnisons françaises ne parviennent pas à maintenir les rebelles. Malgré les renforts envoyés à répétition, la France ne parviendra pas à reprendre possession de l’ile. Sur les 70 000 hommes que Napoléon enverra 55000 mourront des fièvres et des escarmouches. L’indépendance de Saint Domingue sera proclamée le 1er janvier 1804.
Le vodou fut ainsi un véritable catalyseur dans la révolte des esclaves noirs de Saint Domingue, la brêche qui permit aux esprits de trouver une cohésion dans leur quête de liberté. Encore aujourd’hui il a valeur d’affranchissement politique, les chanté pwen fustigent le comportement de ceux qui utilisent le sacré pour accéder au pouvoir et ainsi que les leaders et leurs abus.
Une prière authentifiée est généralement présentée comme étant le point de départ de la révolution anti esclavagiste et anti colonialiste précitée est « la Prière BOUKMAN ».
Au dire des historiens, elle aurait été l’incantation qui fût entonnée par Boukman lors de la cérémonie Vodou qui avait eu lieu au Bwa Kayiman
LAPRIYE BOUKMAN
Bondje ki fè soley ki klere nou anwo,
Ki souleve lanmè, ki fè gwonde loray
Bondje la zot tande kache nan yon nuyaj,
E la a, li gade nou, li wè tou sa blan an fè
Bondje blan an mande krim e pa nou vle byenfè.
Men Dje pa nou an ki si bon odonnen nou vanjans.
Li va kondui bra nou, li va bann asistans.
Jete potre Dje blan an ki swaf dlo nan je nou.
Koute la libète ki pale nan kè nou tous.